Politique ivoirienne / Pas de crise, pas de dialogue ? Le piège dangereux de la démocratie réactive

Interrogé par France 24 sur l’exclusion de figures majeures de l’opposition de la liste électorale, conséquence de décisions judiciaires controversées, le président de l’Assemblée nationale, Adama Bictogo, a indiqué que si cette situation venait à susciter des tensions ou à troubler la stabilité du pays, le président Ouattara pourrait alors envisager une solution.
Cette déclaration soulève plusieurs interrogations majeures, tant sur le plan politique que sur celui de la gouvernance démocratique.
Premièrement, elle laisse entendre que l’État ne se sent pas tenu d’anticiper les frustrations légitimes d’une partie de la classe politique et de ses électeurs, mais qu’il préfère attendre qu’éclatent des tensions avant d’agir. Ce raisonnement, en apparence pragmatique, trahit en réalité une conception réactive du pouvoir, où l’on privilégie la gestion des crises plutôt que leur prévention.
Deuxièmement, cela revient à dire que tant que l’opposition se montre pacifique, ses revendications peuvent être ignorées. Or, la démocratie ne se mesure pas à l’absence momentanée de désordre, mais à la qualité du dialogue politique, à l’inclusivité des élections, et au respect des principes de justice et d’équité.
Enfin, dans un contexte où l’opposition appelle depuis des mois à un dialogue politique inclusif, refuser de tendre l’oreille au motif que le pays est « calme » peut s’interpréter comme un refus délibéré d’ouvrir un espace de consensus. Pourtant, toute démocratie mature sait que le dialogue politique n’est pas une faveur à accorder, mais un devoir à remplir.
Prévenir vaut mieux que guérir, surtout lorsqu’il s’agit de paix sociale et de cohésion nationale. Une élection sans les principales figures de l’opposition n’est pas une élection crédible : c’est une mise en scène. Il ne faut pas attendre l’instabilité pour agir. Il faut agir pour l’éviter.
Delph Bah, Analyste politique & Éveilleur des consciences
Titre de Inforelayeur.
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