CHRONIQUE

Côte d'Ivoire / Mobilisations politiques : entre démonstration de force et soupçon d’artifice

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La scène politique ivoirienne est en pleine ébullition à l’approche de l’élection présidentielle de 2025. Les partis politiques, conscients du rôle symbolique et stratégique des mobilisations de masse, rivalisent d'ingéniosité et de moyens pour remplir stades et artères des villes. Le 2ᵉ congrès du RHDP, tenu le 22 juin 2025 au stade olympique d’Ebimpé, en est une parfaite illustration. Avec un stade bondé, le parti au pouvoir a affiché une démonstration de force censée confirmer sa vitalité et sa capacité à fédérer.

Mais très vite, cette réussite logistique a été entachée par des accusations persistantes : transport pris en charge, distribution de nourriture et surtout, circulation de perdiems. Une vidéo virale montrant un homme distribuant des billets de banque à des passagers dans un car a renforcé les suspicions. Si l’authenticité du contenu n’a pas été officiellement vérifiée, les commentaires en ligne interprètent la scène comme la preuve d’une mobilisation « achetée ».

Cette situation soulève une interrogation fondamentale : les grandes foules visibles dans les meetings politiques sont-elles toujours le reflet d’un réel soutien populaire ? Ou bien résultent-elles, parfois, d’un investissement financier massif à visée électoraliste ?

Mobilisation politique : un enjeu d’image avant tout


En politique, l’image compte autant que le fond. Montrer qu’on peut remplir un stade ou faire descendre des milliers de personnes dans la rue est devenu une sorte de « test de popularité » à grande échelle. Dans un contexte électoral, cela vise à créer une dynamique psychologique : influencer les indécis, impressionner l’opinion publique et décourager les adversaires.

Mais cette logique a ses limites. Le contraste est frappant : aucune polémique majeure n’a accompagné la récente marche du PDCI à Abidjan, ni la fête de la Renaissance organisée par le PPA-CI dans la brousse de Dabou, bien que ces événements aient également connu une mobilisation importante. Cela interroge sur la perception publique du pouvoir en place. Quand un parti d’opposition mobilise, cela est vu comme un acte militant. Quand le parti au pouvoir le fait, des suspicions d’usage des ressources de l’État ou d’avantages matériels surgissent.

Mobilisation vs adhésion


Une foule dense ne signifie pas toujours une base électorale solide. Il y a une différence entre « présence » et « conviction ». Beaucoup peuvent participer à un rassemblement pour des raisons non idéologiques : curiosité, opportunité financière, transport gratuit, etc. L’enjeu, pour les partis, est donc de transformer la mobilisation en adhésion politique durable.

À cet égard, les soupçons de « mobilisation monnayée » sont contre-productifs. Ils réduisent la portée symbolique de l’événement et peuvent alimenter le cynisme des électeurs, déjà souvent méfiants vis-à-vis du monde politique.

Une guerre d’image à double tranchant


La mobilisation populaire reste un indicateur important, mais elle ne peut à elle seule servir de baromètre fiable de la popularité électorale. Dans une démocratie en construction, la transparence, la sincérité des engagements et la qualité du discours politique devraient primer sur la simple démonstration de force logistique.

Les partis doivent éviter l’illusion du nombre et investir dans la construction d’un lien sincère avec les citoyens. Car en définitive, les électeurs se déplacent en foule un jour de meeting, mais ce sont leurs bulletins de vote qui décident du sort d’un candidat.

Trésor Doudou,
Directeur de publication

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Trésor Doudou

2 Commentaire(s)
Adonis
2025-06-25 18:16:56
Tout sera vérifié au soir du 25 octobre 2025
Lombertini
2025-06-25 14:28:24
Belle analyse
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