Micro-trottoir du mercredi/ De l'amour à la haine : Les causes et conséquences des crimes passionnels à Abidjan
Facteurs explicatifs en rapport avec la tradition, les frustrations et les stupéfiants.
Pour madame Assamoa, assistante comptable, ces actes criminels sont alarmants. « Il existe plusieurs raisons qui pourraient expliquer ces actes. On a les normes traditionnelles et culturelles selon lesquelles la femme est inférieure à l'homme, ce qui alimente le désir de domination de l’homme vis-à-vis de la femme. Il y a aussi la consommation de drogue et l'alcoolisme, qui accroissent le nombre de crimes. Une fois que la personne est sous l’emprise de ces stupéfiants, elle n’arrive plus à se contrôler et cherche à brutaliser les personnes vulnérables », analyse-t-elle.
Madame Kouadio, commerçante de pagnes à Abobo, estime que la société ivoirienne traverse une crise morale. « Pour moi c'est un phénomène qui prend de plus en plus de l'ampleur en Côte d'Ivoire et qui touche généralement les jeunes. C'est un fléau très complexe qui touche plusieurs aspects qui peuvent être psychologique, culturel et bien d'autres. »
Ouattara Lamine, étudiant, met en avant l’inadéquation entre l’évolution des mentalités et les mœurs. « Aujourd’hui, les femmes sont plus indépendantes, mais certains hommes ont du mal à l’accepter. Dans notre société, beaucoup d’hommes pensent avoir un droit de propriété sur leur compagne ou ex-compagne. Lorsqu’elles s’émancipent ou les quittent, ils se sentent trahis et peuvent devenir violents », explique-t-il.
Des conséquences dramatiques pour les victimes
Les répercussions de ces crimes passionnels sont profondes. Madame Kouadio souligne la stigmatisation des victimes. « Cette violence peut entraîner des blessures graves voire la mort des victimes dans certains cas. Les enfants qui sont souvent témoins de ces barbaries risquent de souffrir de traumatisme émotionnel et devenir eux-mêmes violents après. »
monsieur Yapo, professeur d’histoire et géographie, s’inquiète de l’insécurité grandissante. « Ces derniers temps on ne fait qu'entendre des meurtres ou des tentatives de meurtre et cela devient très dangereux pour nous par ce que nous ne sommes plus en sécurité. On ne sait plus vraiment à qui faire confiance. »
Propositions de solution ?
Pour monsieur Yapo, l’éducation joue un rôle clé dans la prévention. « il faut d'abord renforcer l'éducation à l'égalité des sexes et au respect des droits dans les écoles et au sein des communautés. Des programmes de sensibilisation doivent promouvoir des relations fondées sur le respect mutuel, l'égalité et le consentement. Il faut prendre des initiatives qui vont sensibiliser les jeunes générations à la nécessité de remettre en cause les stéréotypes de genre et de violence. »
Bamba salimata, sage-femme, appelle à des sanctions plus strictes. « La justice doit être plus sévère envers ceux qui commettent ces crimes. Il faut aussi créer des espaces de dialogue et de soutien pour les femmes victimes, car beaucoup d’entre elles n’osent pas parler par peur des représailles. »
Ouattara Lamine, de son côté, prône un meilleur encadrement social. « La violence ne naît pas du jour au lendemain. Il faut accompagner les personnes fragiles psychologiquement, créer des centres de suivi pour les hommes violents et encourager le dialogue au sein des couples en difficulté. »
Notons que Les crimes passionnels constituent une menace croissante pour la société ivoirienne. Les facteurs explicatifs sont nombreux : traditions patriarcales, frustration, drogue, jalousie excessive... Les conséquences sont dramatiques, affectant non seulement les victimes mais aussi leurs proches et l’ensemble de la société. Pour endiguer ce fléau, l’éducation, la sensibilisation et des mesures judiciaires plus strictes apparaissent comme des solutions indispensables. Mais au-delà des actions des autorités, c’est un changement profond des mentalités qui est nécessaire pour que l’amour ne soit plus un prétexte à la violence.
Saturnin O. et Mariam S
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